Michel Fugain - La traque

Quel temps pourri, il pleut encore,
Pas fait pour arranger le décor,
Y faut pas réfléchir,
Faut marcher,
Marcher, sinon ils vont me piétiner.
Ils me poussent de trottoir en trottoir
Comme un mouton à l'abattoir.

Et les bagnoles, je sais bien qu'elles veulent ma peau!
Allez, faut que j'aille me planquer dans le métro...

Mais pourquoi ces gens-là me font la gueule?
Le métro détraqué est sur le quai.
Je suis parqué, traqué,
Je suis perdu, je suis foutu,
J'en peux plus!

Je prendrais bien un petit café
Avant d'aller bosser,
Mais je vais même pas pouvoir l'avoir...
Tu crois qu'il se pousserait, ce gros lard?
Ça y est, je suis en retard,
Je vais encore me faire engueuler!
Depuis le temps qu'ils veulent me virer!

Regarde ça: tu dis bonjour,
Ils répondent pas, ils aboient!
Je sais qu'ils m'aiment pas!

Mais pourquoi mon boulot me fait la gueule?
Je voudrais tout plaquer, je vais craquer,
Ils vont me faire claquer!
Je suis perdu, je suis foutu,
J'en peux plus!

Je voudrais bien me retrouver chez moi,
Ne plus bouger, vivre tout seul avec moi,
Fermer la porte et balancer la clef
Et me laisser vivre en sauvage, en voyage
Dans mon jardin secret,
Dans ma musique et dans mes bouquins,
Dans un silence qui n'aurait jamais de fin.

Je sais bien qu'ils me regardent tous comme si j'étais pas normal,
Je sais bien que, dans mon dos, ils disent que je suis malade!
C'est ma faute, à moi, si je suis personne?
Si je suis rien,
Rien qu'une mouche,
Une mouche qu'on peut écraser,
Une mouche qui peut même pas voler,
Une mouche au ras du sol?

Feu vert, feu rouge, les rues, les rails, les murs!
Feu vert, feu rouge...

Et pourquoi cette ville me fait la gueule?
J'ai rien dit, j'ai marché, j'ai pas mouffeté!
Elle veut me faire crever!
Je suis perdu, je suis foutu,
J'en peux plus!

Je voudrais bien me retrouver chez moi,
Ne plus bouger, vivre tout seul avec moi,
Fermer la porte et balancer la clef,
Et me laisser vivre en sauvage, en voyage,
Dans mon jardin secret,
Dans ma musique et dans mes bouquins,
Dans un silence qui n'aurait jamais de fin...

Je voudrais m'en aller au-delà de moi,
Aller me fondre dans le vide fascinant, vertigineux, du néant,
Éclater en poussière,
Éclater en lumière
Et ne plus revenir...